Elle se
réfugiait dans sa chambre et n’en ressortait que deux ou trois heures plus
tard, en tout cas bien plus que le temps nécessaire à un changement de robe ou
un brushing.
Maman qui
ne se montrait jamais sans être impeccablement apprêtée, si aimable et présentable.
Maman
avait des absences.
De temps
en temps, et cette année-là, presque tous les jours.
Je jouais
dans le grand couloir. Je guettais sans en avoir l’air et l’entrevoyais
furtivement par l’embrasure de la porte. Immobile des heures durant, elle semblait
regarder par la fenêtre. La valse hypnotique des nuages, le vol aigu des
martinets, la lumière fantasque entre les branches des peupliers. L’illusion
d’une paisible contemplation durait le temps d’un battement de cils. D’un
battement de cils seulement car son attitude ne recelait rien de joyeux ou de
méditatif. Je me détournais, effrayé par la fixité de son regard. Je repartais
sur la pointe des pieds, chose inhabituelle pour l’enfant bruyant que j’étais.
Je percevais sans rien y comprendre l’inquiétante étrangeté de ce tableau.