Tu peux
nous parler, tu sais.
Leurs
voix chuchotent, embuées de précautions.
Ils sont
tous les deux face à elle. Ils veulent savoir, comprendre, aider.
Mais elle
ne sait pas quoi leur dire. Elle voudrait juste dormir, ne plus se réveiller,
se réveiller dans une autre vie.
Ils
attendent. Ils ont eu peur cette nuit. Sans doute n’ont-ils pas dormi, sa mère
a pleuré. L’inquiétude depuis des heures déjà a gommé la colère. Ils ne la
quittent pas des yeux, leurs visages tendus vers elle.
Elle bredouille
qu’elle ne sait pas, qu’elle en a marre. Elle ajoute, à tout hasard, qu’elle ne
veut plus aller au lycée.
Mais… Pourquoi ?
Leurs
voix montent dans l’aigu, pleines de questions.
Le
policier a été très bien, humain et bienveillant, sans jugement. Il les a
alertés sur l’âge de leur fille, l’adolescence, son malaise, les drogues, les
comportements à risques.
Elle
regarde ses chaussures, ses chaussures qui lui font un mal de chien, qu’elle
aimerait enlever mais c’est impossible. Il semble qu’avec la souffrance elles se
soient soudées à ses pieds. Pour toujours. Une marque au fer. Des chaussures à
talons vernies.
Tu peux
nous parler, tu sais.