Trop tard
pour se défiler. Ils l’ont vue. Ils sourient. Et, réflexe idiot, elle sourit
aussi.
Là au
milieu des invités, avec Sébastien, c’est Marc, Marc Langlois ! Son
soupirant des années lycée. Un brun trop maigre et trop timide qui durant trois
ans s’était assis derrière elle en classe, amoureux toujours éconduit toujours
éperdu.
Il a
visiblement gagné en aisance Marc, et plus encore en corpulence. Et les
cheveux, les cheveux… plus un si bien qu’un instant elle se demande si il les
avait vraiment bruns.
Marc
Langlois, chauve et bedonnant. Ce que les ans nous infligent !
Quoiqu’il
n’ait pas été épargné, elle le remet sans hésitation. Il sourit. Il l’a reconnue aussitôt.
Elle, elle n’a pas changé à part quelques rides d’expression ; la fesse un peu molle et le dessous des bras qui pend mais ça, habillée, ça ne se voit pas. On lui donne dix ans de moins au bas mot. Elle rentre de vacances, elle est en forme, elle rayonne, même son fils l’en a complimentée quand elle est sortie de la salle de bains, apprêtée pour cette mondanité qu’elle n’avait pu décliner.
Elle, elle n’a pas changé à part quelques rides d’expression ; la fesse un peu molle et le dessous des bras qui pend mais ça, habillée, ça ne se voit pas. On lui donne dix ans de moins au bas mot. Elle rentre de vacances, elle est en forme, elle rayonne, même son fils l’en a complimentée quand elle est sortie de la salle de bains, apprêtée pour cette mondanité qu’elle n’avait pu décliner.
Marc
Langlois, bon Dieu ! Il lui payait des cafés, lisait les livres qu’elle
aimait juste pour pouvoir en parler avec elle, se débrouillait pour l’accompagner
sur le trajet du lycée (elle le surprenait à laisser passer un bus,
maladroitement caché derrière le kiosque à journaux, pour prendre le même
qu’elle)… Il va la reconnaître, c’est certain, c’est déjà fait. La soirée sera
pire encore que prévu.
Elle n’a aucune
envie de revoir Marc Langlois, ni la plupart de ses amis de jeunesse. Elle les
trouve tous si vieux, si pathétiques, et l’on n'a plus rien à se dire maintenant
qu’on ne s’ennuie plus en cours avec madame Fabre en rêvant de la vie héroïque
qu’on aura plus tard.
Marc
Langlois lui sourit. Il a l’œil pétillant. Une vivacité dont elle ne se
souvient pas qu’elle l’ait singularisé jadis.
Il ne
voyait qu’elle et elle feignait de ne rien voir. Trois ans durant. Ce qu’on
peut être ballot à cet âge, il aurait suffi qu’elle le décourage franchement,
qu’il porte un instant son regard sur sa copine Fiona qui ne se serait pas faite
prier elle.
Il lui
avait offert des roses pour son anniversaire en seconde, il avait presque les
larmes aux yeux. Oh, merde ! Marc Langlois !
Elle avait
été son amour de jeunesse, le premier à coup sûr, celui qu’on n’oublie jamais.
Marc toujours éconduit, toujours éperdu.
Elle va
faire semblant de ne pas le reconnaître. Elle va nier. Il parait qu’on a tous
sur cette planète un double parfait. Elle n’est pas sa Cécile et n’a pas étudié
au lycée Lamartine.
Ils sont
là. Ça y est. Sur elle. Tout proches. On se salue. On se présente. Cécile, je
te présente Marc, un ancien collègue, il dirige Marson’s.
Mais il
ne se passe rien. Pas d’effusions, ni regards appuyés ou bégaiements émus.
Il ne se passe rien. Rien d’autre que les verres qui tintent et les amabilités
d’usage.
Marc ne
l’a pas reconnue.
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